Je ne suis pas un ayatollah du travail du bois à la main. En ceci que je ne vois pas d’inconvénient à travailler le bois à la machine quand il s’agit de poser le cerveau et sortir les bras. C’est d’ailleurs ce en quoi la machine excelle. Parce que si la machine n’est pas créative et là est tout le noeud du problème (voyez donc tout le foin qui est fait autour de l’IA), elle permet de s’atteler à des tâches laborieuses et répétitives avec une efficacité redoutable. En revanche, il me semble fondamental de ne pas basculer de l’autre côté du cheval. Le toutmachine (à fortiori dans le cadre d’une pratique loisir adulte) constitue selon moi une impasse.
Ceci dit, c’est en se frottant à une réalisation très particulière que j’ai pris conscience de la valeur ajoutée que l’on pouvait avoir à travailler le bois à la machine (dans un cadre de pratique loisir adulte, s’entend). En effet, la bibliothèque à laquelle je souhaitait m’attaquer avait déjà été réalisée à la machine. Et parce qu’elle a déjà été réalisée à la machine, j’ai mis un point d’honneur à la réaliser à la main…
Imbécilité? Orgueil? Oui très certainement, et en même temps errarae humanum est (même si ce n’est pas la première fois)! En premier lieu parce qu’avant de foncer tête baissé dans un projet, ça vaut le coup de prendre le recul nécessaire et de réfléchir un minimum. (Ah! l’impétuosité de la jeunesse…!!!) Parce qu’en m’attelant à cette réalisation d’apparence pourtant simple, je ne m’attendais pas à quelque chose d’aussi velu techniquement parlant… Et puis avec ses 2m20 x 2m20, ses 5 plateaux d’environ 180cm x 45cm, c’est bien simple: il y avait un terrain de foot entier en surface à corroyer! Et pour rajouter à cela rien (ou si peu) n’est droit… Parmi les 76 pièces qui constituent la réalisation, certaines même présentent des faces effilées. Autrement dit, leur épaisseur diminue progressivement dans le sens de la longueur de la pièce.
Alors c’est bien simple: il m’a fallu six années pour venir à bout de cette réalisation. Non pas que j’ai travaillé dessus 10.000h (l’équivalent de six années de travail)… Bien au contraire: l’avancée était tellement laborieuse que j’avais du mal à poursuivre la réalisation. Jusqu’au moment où j’ai pris le parti d’y introduire la machine. En revanche, là où c’était nécessaire et juste là où c’était nécessaire.
Parce qu’en réalité ce meuble a été conçu avec en tête un câblage qui consiste à travailler le bois à la machine. C’est bien simple: quand on est un marteau, on n’envisage le monde que sous forme de clous. Et la conception du meuble pour le coup transpire le présupposé machine. La réalisation est conçue de telle manière que la profondeur du meuble se divise en quatre plans d’épaisseur égale… Vous voyez déjà un peu là où je veux en venir? Les assemblages ne sont que des assemblages à mi-bois. Pas l’ombre d’un tenon-mortaise ni-même d’une queue d’aronde… Rien que du très droit, de l’uniforme (ou presque!). D’ailleurs, l’étagère aurait été faite en plastique ou en béton, ç’aurait été la même chose…! Un gros travail de design pour lequel le média qu’est la matière bois importe peu finalement.
Alors oui, je dois avouer, j’ai pêché! J’ai utilisé une raboteuse de chantier pour conférer à toutes les pièces d’un même plan dans la profondeur strictement la même épaisseur (Schlack! un gros coup de fouet dans le dos!). Oui j’ai pêché en utilisant une domino pour faciliter la mise à fleur des pièces et éviter de galérer à reprendre les marches entre les lames des plateaux (Re-Schlack! un autre gros coup de fouet dans le dos!)… Oui j’ai pêché parce que pour poncer la surface d’un terrain de foot, rien de mieux qu’une ponçeuse qui en a dans le ventre…! (Re-schlack – eh mais aïe-euh, ça picote!!!)
Alors la morale de cette histoire? C’est bien simple: il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis ! D’ailleurs si c’était à refaire, je prendrais d’emblée plus de recul. Juste pour mieux appréhender la réalisation. D’ailleurs je mettrai bien plus tôt la machine en œuvre dans le processus de fabrication… Maintenant, je dois toutefois avouer que le bruit et la poussière, ça va bien deux minutes. Parce que vous ne savez pas combien il me tarde de travailler à nouveau au guillaume et à la guimbarde!!!
6 replies to “Travailler le bois à la machine (Quoi…!!??)”
Petitjean Régis
En vrai pour tout t’avouer… quand j’ai vu la photo de la bibliothèque, je me suis tout de suite dit « il a triché, ce n’est pas possible qu’il ait tout fait à la main »… (à part bien sûr si tu ne comptes pas gagner ta vie avec ton métier).
Parce que j’ai ce dilemme aussi, à mon faible niveau de débutant dans le travail du bois… quand devient-il acceptable de mettre en route la machine au lieu de me faire ch… à le faire à la main ?
Je suis en train de finir ton banc de sciage, et j’ai fait la première mortaise du pied au bédane (3 heures, première fois pour moi au bédane…) puis la seconde avec un bédane et la perceuse colonne + mèche forstner (1h30)… et hier pour la 3ème j’ai craqué j’ai pris la défonceuse (20min)!
Je pensais être déçu, que mon estime de moi en prendrait un coup… En réalité, quelle satisfaction de ne pas y avoir passé des heures et de voir mon projet se concrétiser plus rapidement !!!
Je peux donc tellement comprendre que tu aies craqué, et ta réalisation n’en est pas moins belle et réussie !
Bonjour Régis,
Le point est très intéressant et traiter de la pertinence du travail du bois à la main vs. le travail du bois à la machine demande un certain développement et nécessiterait quelques heures de discussion… Dommage que les choses ne puissent pas être aussi tranchées et il faudrait vraiment que je prenne ce temps!!!
Ce que j’ai essayé de montrer à travers cet article, c’est que la manière que l’on a de travailler le bois, la façon dont les réalisation sont conçues dépendent grandement des outils avec lesquels on travaille, c’est à dire des outils (intellectuels comme au sens premier du terme) dont on dispose. Et à bien y réfléchir, ce n’est pas l’imagination qui est limitative mais bien les outils que l’on on a à disposition.
Et s’il est tout à fait envisageable de réaliser cette pièce entièrement à la main, c’est une tâche laborieuse que de le faire. Juste parce que la réalisation à laquelle cet article s’attache ne s’y prête guère, et c’est un doux euphémisme! Ceci dit, tous les abouts des mi-bois (sans exception) ont été réalisés à la main et la précision d’assemblage est amplement meilleure qu’à la machine. Sauf erreures, et j’en ai fait!
Maintenant, la machine a cet intérêt particulier que sa mise en œuvre par un novice est beaucoup plus aisée parce qu’elle nécessite bien moins de compétence, d’adresse et de connaissance que lorsque l’on met en œuvre des outils à main. Et ce n’est pas un mal: ça permet très rapidement de mener à bien des réalisations et d’éprouver cette joie de voir la réalisation naître sous ses yeux!
Or avec un peu de pratique on arrive a considérablement raccourcir le temps que l’on passe sur une tâche donnée. Un meilleur affûtage, une gestuelle plus efficace, un tour de main plus sûr permettent de gagner un temps considérable. A un point tel qu’il me faut aujourd’hui 15 à 20min pour creuser la mortaise de pied pour le banc de sciage. D’ailleurs je suis d’autant plus à l’aise pour aborder ce point que non seulement il m’a fallu plusieurs heures pour creuser ma toute première mortaise mais surtout elle avait l’ajustement d’une cheville après trois semaines de plâtre!
Alors, c’est vrai, choisir le travail du bois à la main ce n’est pas faire le choix du chemin le plus simple et peut même, ce projet en est une illustration, mener à une impasse. Ceci dit, il s’agit d’un choix duquel on sort toujours grandi, parce qu’il permet d’étoffer l’éventail de ses techniques, de gagner en efficacité et par conséquent d’avoir le choix, c’est à dire d’être en mesure de choisir de manière éclairée de prendre le chemin de la machine ou celui des outils à main!
Cela me fait sourire, car je viens de recevoir un bouvet Veritas… je l’ai pris en main pour la première fois hier… bon bah je peux comprendre que certains préfèrent la scie sur table ! Et pourtant je sais que je vais « perdre » du temps à apprendre à le manier car mes oreilles et mes poumons m’en seront reconnaissants.
Mais l’outil électrique a cet avantage de nous décharger d’une partie de la responsabilité de l’erreur qui survient. Après tout, nous sommes presque 2 à travailler !
Il faut aussi tenir compte des contextes personnels :
– concilier vie de famille, travail et passion
– pratiquer dans un espace de travail digne de ce nom (un de mes projets 2024 sera un vrai établi)
– aucune formation, absence de « maitre d’apprentissage » (les vidéos Youtube ont leurs limites)
En tout cas merci pour le partage de tes expériences, elles sont source d’inspiration, même si je suis découragé parfois devant la piètre qualité de mon propre travail !
Merci aussi pour ton retour. Ça ne fait qu’illustrer le fait que même si ça m’aurait arrangé, il n’y a pas de réponse toute faite parce qu’il y a beaucoup de choses qui rentrent en ligne de compte quand il s’agit de partir plutôt travail du bois à la machine ou travail du bois plutôt à la main. La courbe de progression, l’emprunte au sol, le budget d’équipement, la santé, la sécurité, le coût de maintien en condition des outils de l’atelier, l’autonomie dans la réalisation et les dépendances externes, le temps passé à la réalisation, etc… Et tout ça est de surcroît à moduler en fonction de nos cas, nos circonstances et situations personnelles: Jacques (voir le commentaire plus loin) a sacrifié une partie de son garage pour travailler, tandis que d’autres bossent dans des apparts (sic!) et des troisièmes ont un atelier spacieux et lumineux à disposition…
Après, la piètre qualité que tu évoques (on est souvent pas très tendre envers ses réalisations et je suis le premier de ceux-là) n’est pas une fatalité et je m’attache à montrer que je ne suis pas magicien: avec des bons outils, bien réglés, bien affûtés et mis en œuvre à bon escient, on fait déjà un travail plus qu’acceptable. J’en veux pour preuve une queue d’aronde qu’un stagiaire a réalisé à l’issue du stage de pratique des fondamentaux…
Allez en paix, mon fils Sébastien, vos péchés vous seront pardonnés, tout au moins après deux Avé et un Pater. A la main ou à la machine, c’est une histoire qui dépend de multiples facteurs. Ce ne sont pas les mêmes histoires, elle sont intéressantes toutes les deux car il s’agit dans les deux cas d’honorer le bois et rien n’empêche de les croiser. Moi, je me dis que parfois une machine m’aiderait à gagner du temps ou à éviter du répétitif. Mais c’est pas compliqué, j’ai pour le moment pas la place pour des machines. J’ai découvert le travail manuel du bois il y a quelques années, et j’adore, d’autant qu’enfin je peux m’y adonner, même dans un espace restreint, ce qui fut mon garage, la voiture n’a plus le droit d’y entrer, je lui ai construit un abri, … en bois …. haha. Car c’était mon problème, après avoir suivi des cours du soir en menuiserie dans une école technique, je me disais: que vais-je pouvoir faire sans l’espace pour des marchines. Et le bonheur de rencontrer près de chez moi (Louvain près de Bruxelles) quelqu’un qui m’a fait entrer dans l’univers magique du travail manuel du bois. Ce fut le coup de foudre et la possiblité de réaliser que, oui, même avec un espace modeste, je peux m’adonner à ce magnifique hobby. Et j’y suis heureux dans mon ex-garage devenu atelier, j’y suis heureux parmi mes rabots, ciseaux, scies, sciure, copeaux, et amusé du regard interrogatif et intérresé de ce qui sont appelés à traverser cette pièce au hasard de leurs déplacements. J’y suis heureux car j’ai créé dans cette ambiance bois-manuel une entrée dans l’univers de l’artisanat qui m’a toujours fasciné et que je ne me contente plus de regarder mais que je découvre de l’intérieur, outils à la main à mon établi. Et cela me place à la croisée de tant de chemins que j’ai un malin plaisir à raconter comme un gamin tout excité pas juste ce que je fais, mais ce que j’y vis dans ce lieu de presque un autre temps. Bon, les gars;, je m’arrête là car je vais tenir le crachoir pendant une éternité, tant ce contact charnel avec le bois m’inspire de multiples réflexions qui croisent d’autres de mes passions. Quand Seb organisera à Salvignac un congrès international des boiseux en folie, je viendrai vous en parler en long et en large. Sur ce, Régis, sois fier d’être sur le chemin sur lequel tu es et indulgent dans tes réalisations, le monde ne s’est pas fait en un jour.
Bien à vous les amoureux du bois
Jacques
Deux avé maria et un pater… (merde… faut pas que j’oublie… deux ave maria et un pater…)
Merci pour ce très beau commentaire, sensible et riche de partage et d’expérience. C’est toujours un plaisir renouvelé que de te lire, Jacques!
Et l’idée d’un congrès international des boiseux en folie me plaît beaucoup même l’atelier Touchons du bois à Epinal tient déjà ce rôle, à fortiori cette année avec la présence de Tom Fidgen!
A très vite.
(deux avé maria et un pater…)
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Travailler le bois à la machine (Quoi…!!??)
Je ne suis pas un ayatollah du travail du bois à la main. En ceci que je ne vois pas d’inconvénient à travailler le bois à la machine quand il s’agit de poser le cerveau et sortir les bras. C’est d’ailleurs ce en quoi la machine excelle. Parce que si la machine n’est pas créative et là est tout le noeud du problème (voyez donc tout le foin qui est fait autour de l’IA), elle permet de s’atteler à des tâches laborieuses et répétitives avec une efficacité redoutable. En revanche, il me semble fondamental de ne pas basculer de l’autre côté du cheval. Le tout machine (à fortiori dans le cadre d’une pratique loisir adulte) constitue selon moi une impasse.
Ceci dit, c’est en se frottant à une réalisation très particulière que j’ai pris conscience de la valeur ajoutée que l’on pouvait avoir à travailler le bois à la machine (dans un cadre de pratique loisir adulte, s’entend). En effet, la bibliothèque à laquelle je souhaitait m’attaquer avait déjà été réalisée à la machine. Et parce qu’elle a déjà été réalisée à la machine, j’ai mis un point d’honneur à la réaliser à la main…
Imbécilité? Orgueil? Oui très certainement, et en même temps errarae humanum est (même si ce n’est pas la première fois)!
En premier lieu parce qu’avant de foncer tête baissé dans un projet, ça vaut le coup de prendre le recul nécessaire et de réfléchir un minimum. (Ah! l’impétuosité de la jeunesse…!!!)
Parce qu’en m’attelant à cette réalisation d’apparence pourtant simple, je ne m’attendais pas à quelque chose d’aussi velu techniquement parlant… Et puis avec ses 2m20 x 2m20, ses 5 plateaux d’environ 180cm x 45cm, c’est bien simple: il y avait un terrain de foot entier en surface à corroyer!
Et pour rajouter à cela rien (ou si peu) n’est droit… Parmi les 76 pièces qui constituent la réalisation, certaines même présentent des faces effilées. Autrement dit, leur épaisseur diminue progressivement dans le sens de la longueur de la pièce.
Alors c’est bien simple: il m’a fallu six années pour venir à bout de cette réalisation. Non pas que j’ai travaillé dessus 10.000h (l’équivalent de six années de travail)… Bien au contraire: l’avancée était tellement laborieuse que j’avais du mal à poursuivre la réalisation. Jusqu’au moment où j’ai pris le parti d’y introduire la machine.
En revanche, là où c’était nécessaire et juste là où c’était nécessaire.
Parce qu’en réalité ce meuble a été conçu avec en tête un câblage qui consiste à travailler le bois à la machine. C’est bien simple: quand on est un marteau, on n’envisage le monde que sous forme de clous. Et la conception du meuble pour le coup transpire le présupposé machine. La réalisation est conçue de telle manière que la profondeur du meuble se divise en quatre plans d’épaisseur égale… Vous voyez déjà un peu là où je veux en venir?
Les assemblages ne sont que des assemblages à mi-bois. Pas l’ombre d’un tenon-mortaise ni-même d’une queue d’aronde… Rien que du très droit, de l’uniforme (ou presque!). D’ailleurs, l’étagère aurait été faite en plastique ou en béton, ç’aurait été la même chose…! Un gros travail de design pour lequel le média qu’est la matière bois importe peu finalement.
Alors oui, je dois avouer, j’ai pêché! J’ai utilisé une raboteuse de chantier pour conférer à toutes les pièces d’un même plan dans la profondeur strictement la même épaisseur (Schlack! un gros coup de fouet dans le dos!). Oui j’ai pêché en utilisant une domino pour faciliter la mise à fleur des pièces et éviter de galérer à reprendre les marches entre les lames des plateaux (Re-Schlack! un autre gros coup de fouet dans le dos!)… Oui j’ai pêché parce que pour poncer la surface d’un terrain de foot, rien de mieux qu’une ponçeuse qui en a dans le ventre…! (Re-schlack – eh mais aïe-euh, ça picote!!!)
Alors la morale de cette histoire? C’est bien simple: il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis ! D’ailleurs si c’était à refaire, je prendrais d’emblée plus de recul. Juste pour mieux appréhender la réalisation. D’ailleurs je mettrai bien plus tôt la machine en œuvre dans le processus de fabrication…
Maintenant, je dois toutefois avouer que le bruit et la poussière, ça va bien deux minutes. Parce que vous ne savez pas combien il me tarde de travailler à nouveau au guillaume et à la guimbarde!!!
6 replies to “Travailler le bois à la machine (Quoi…!!??)”
Petitjean Régis
En vrai pour tout t’avouer… quand j’ai vu la photo de la bibliothèque, je me suis tout de suite dit « il a triché, ce n’est pas possible qu’il ait tout fait à la main »… (à part bien sûr si tu ne comptes pas gagner ta vie avec ton métier).
Parce que j’ai ce dilemme aussi, à mon faible niveau de débutant dans le travail du bois… quand devient-il acceptable de mettre en route la machine au lieu de me faire ch… à le faire à la main ?
Je suis en train de finir ton banc de sciage, et j’ai fait la première mortaise du pied au bédane (3 heures, première fois pour moi au bédane…) puis la seconde avec un bédane et la perceuse colonne + mèche forstner (1h30)… et hier pour la 3ème j’ai craqué j’ai pris la défonceuse (20min)!
Je pensais être déçu, que mon estime de moi en prendrait un coup… En réalité, quelle satisfaction de ne pas y avoir passé des heures et de voir mon projet se concrétiser plus rapidement !!!
Je peux donc tellement comprendre que tu aies craqué, et ta réalisation n’en est pas moins belle et réussie !
Sébastien
Bonjour Régis,
Le point est très intéressant et traiter de la pertinence du travail du bois à la main vs. le travail du bois à la machine demande un certain développement et nécessiterait quelques heures de discussion… Dommage que les choses ne puissent pas être aussi tranchées et il faudrait vraiment que je prenne ce temps!!!
Ce que j’ai essayé de montrer à travers cet article, c’est que la manière que l’on a de travailler le bois, la façon dont les réalisation sont conçues dépendent grandement des outils avec lesquels on travaille, c’est à dire des outils (intellectuels comme au sens premier du terme) dont on dispose. Et à bien y réfléchir, ce n’est pas l’imagination qui est limitative mais bien les outils que l’on on a à disposition.
Et s’il est tout à fait envisageable de réaliser cette pièce entièrement à la main, c’est une tâche laborieuse que de le faire. Juste parce que la réalisation à laquelle cet article s’attache ne s’y prête guère, et c’est un doux euphémisme! Ceci dit, tous les abouts des mi-bois (sans exception) ont été réalisés à la main et la précision d’assemblage est amplement meilleure qu’à la machine. Sauf erreures, et j’en ai fait!
Maintenant, la machine a cet intérêt particulier que sa mise en œuvre par un novice est beaucoup plus aisée parce qu’elle nécessite bien moins de compétence, d’adresse et de connaissance que lorsque l’on met en œuvre des outils à main. Et ce n’est pas un mal: ça permet très rapidement de mener à bien des réalisations et d’éprouver cette joie de voir la réalisation naître sous ses yeux!
Or avec un peu de pratique on arrive a considérablement raccourcir le temps que l’on passe sur une tâche donnée. Un meilleur affûtage, une gestuelle plus efficace, un tour de main plus sûr permettent de gagner un temps considérable. A un point tel qu’il me faut aujourd’hui 15 à 20min pour creuser la mortaise de pied pour le banc de sciage. D’ailleurs je suis d’autant plus à l’aise pour aborder ce point que non seulement il m’a fallu plusieurs heures pour creuser ma toute première mortaise mais surtout elle avait l’ajustement d’une cheville après trois semaines de plâtre!
Alors, c’est vrai, choisir le travail du bois à la main ce n’est pas faire le choix du chemin le plus simple et peut même, ce projet en est une illustration, mener à une impasse. Ceci dit, il s’agit d’un choix duquel on sort toujours grandi, parce qu’il permet d’étoffer l’éventail de ses techniques, de gagner en efficacité et par conséquent d’avoir le choix, c’est à dire d’être en mesure de choisir de manière éclairée de prendre le chemin de la machine ou celui des outils à main!
Petitjean Régis
Cela me fait sourire, car je viens de recevoir un bouvet Veritas… je l’ai pris en main pour la première fois hier… bon bah je peux comprendre que certains préfèrent la scie sur table ! Et pourtant je sais que je vais « perdre » du temps à apprendre à le manier car mes oreilles et mes poumons m’en seront reconnaissants.
Mais l’outil électrique a cet avantage de nous décharger d’une partie de la responsabilité de l’erreur qui survient. Après tout, nous sommes presque 2 à travailler !
Il faut aussi tenir compte des contextes personnels :
– concilier vie de famille, travail et passion
– pratiquer dans un espace de travail digne de ce nom (un de mes projets 2024 sera un vrai établi)
– aucune formation, absence de « maitre d’apprentissage » (les vidéos Youtube ont leurs limites)
En tout cas merci pour le partage de tes expériences, elles sont source d’inspiration, même si je suis découragé parfois devant la piètre qualité de mon propre travail !
Sébastien
Merci aussi pour ton retour. Ça ne fait qu’illustrer le fait que même si ça m’aurait arrangé, il n’y a pas de réponse toute faite parce qu’il y a beaucoup de choses qui rentrent en ligne de compte quand il s’agit de partir plutôt travail du bois à la machine ou travail du bois plutôt à la main. La courbe de progression, l’emprunte au sol, le budget d’équipement, la santé, la sécurité, le coût de maintien en condition des outils de l’atelier, l’autonomie dans la réalisation et les dépendances externes, le temps passé à la réalisation, etc… Et tout ça est de surcroît à moduler en fonction de nos cas, nos circonstances et situations personnelles: Jacques (voir le commentaire plus loin) a sacrifié une partie de son garage pour travailler, tandis que d’autres bossent dans des apparts (sic!) et des troisièmes ont un atelier spacieux et lumineux à disposition…
Après, la piètre qualité que tu évoques (on est souvent pas très tendre envers ses réalisations et je suis le premier de ceux-là) n’est pas une fatalité et je m’attache à montrer que je ne suis pas magicien: avec des bons outils, bien réglés, bien affûtés et mis en œuvre à bon escient, on fait déjà un travail plus qu’acceptable. J’en veux pour preuve une queue d’aronde qu’un stagiaire a réalisé à l’issue du stage de pratique des fondamentaux…
Au plaisir d’échanger!
Jacques Grisart
Allez en paix, mon fils Sébastien, vos péchés vous seront pardonnés, tout au moins après deux Avé et un Pater. A la main ou à la machine, c’est une histoire qui dépend de multiples facteurs. Ce ne sont pas les mêmes histoires, elle sont intéressantes toutes les deux car il s’agit dans les deux cas d’honorer le bois et rien n’empêche de les croiser. Moi, je me dis que parfois une machine m’aiderait à gagner du temps ou à éviter du répétitif. Mais c’est pas compliqué, j’ai pour le moment pas la place pour des machines. J’ai découvert le travail manuel du bois il y a quelques années, et j’adore, d’autant qu’enfin je peux m’y adonner, même dans un espace restreint, ce qui fut mon garage, la voiture n’a plus le droit d’y entrer, je lui ai construit un abri, … en bois …. haha. Car c’était mon problème, après avoir suivi des cours du soir en menuiserie dans une école technique, je me disais: que vais-je pouvoir faire sans l’espace pour des marchines. Et le bonheur de rencontrer près de chez moi (Louvain près de Bruxelles) quelqu’un qui m’a fait entrer dans l’univers magique du travail manuel du bois. Ce fut le coup de foudre et la possiblité de réaliser que, oui, même avec un espace modeste, je peux m’adonner à ce magnifique hobby. Et j’y suis heureux dans mon ex-garage devenu atelier, j’y suis heureux parmi mes rabots, ciseaux, scies, sciure, copeaux, et amusé du regard interrogatif et intérresé de ce qui sont appelés à traverser cette pièce au hasard de leurs déplacements. J’y suis heureux car j’ai créé dans cette ambiance bois-manuel une entrée dans l’univers de l’artisanat qui m’a toujours fasciné et que je ne me contente plus de regarder mais que je découvre de l’intérieur, outils à la main à mon établi. Et cela me place à la croisée de tant de chemins que j’ai un malin plaisir à raconter comme un gamin tout excité pas juste ce que je fais, mais ce que j’y vis dans ce lieu de presque un autre temps. Bon, les gars;, je m’arrête là car je vais tenir le crachoir pendant une éternité, tant ce contact charnel avec le bois m’inspire de multiples réflexions qui croisent d’autres de mes passions. Quand Seb organisera à Salvignac un congrès international des boiseux en folie, je viendrai vous en parler en long et en large. Sur ce, Régis, sois fier d’être sur le chemin sur lequel tu es et indulgent dans tes réalisations, le monde ne s’est pas fait en un jour.
Bien à vous les amoureux du bois
Jacques
Sébastien
Deux avé maria et un pater… (merde… faut pas que j’oublie… deux ave maria et un pater…)
Merci pour ce très beau commentaire, sensible et riche de partage et d’expérience. C’est toujours un plaisir renouvelé que de te lire, Jacques!
Et l’idée d’un congrès international des boiseux en folie me plaît beaucoup même l’atelier Touchons du bois à Epinal tient déjà ce rôle, à fortiori cette année avec la présence de Tom Fidgen!
A très vite.
(deux avé maria et un pater…)