Cet instant où je franchis les portes de cet atelier d’ébénisterie manuelle est toujours un moment particulier.
C’est généralement le moment où les rayons du soleil matinal traversent la pièce pour baigner d’une lumière douce les copeaux éparpillés à même le sol.
Les outils se languissent des mains qui vont les saisir et le nez hume les odeurs qui flottent dans l’air de la pièce.
Il y a une agréable odeur de café et une doux parfum de bois.
C’est au cœur de l’atelier que la métamorphose opère, que tout prend forme. C’est ici que naît l’idée. Il se peut d’ailleurs que de nombreuses minutes s’écoulent avant que l’inspiration ne se manifeste. Et j’ai remarqué que la lumière jaillit souvent quand les mains sont en contact avec le bois d’une part et l’acier des outils d’autre part.
Justement, l’atelier est l’espace même où les réalisations prennent vie : une ligne tout d’abord. Ensuite une forme un peu vague et éthérée qui va petit à petit prendre consistance. Puis, au fur et à mesure que l’idée se concrétise, la main suit ce que l’esprit lui dicte.
C’est ici, au sein de cet atelier d’ébénisterie manuelle, que les outils prolongent la main de l’homme. C’est ici qu’ils ont tout l’espace pour s’exprimer et donner forme à la matière.
Dans cet endroit, les gestes transforment de simples planches en une réalisation concrète et solide sur laquelle on pose un regard délicat.
Dans l’atelier on entend le ronronnement de la scie qui coupe la planche puis le fracas de la chute quand elle vient heurter le sol. On y entend aussi le chuchotement velouté du rabot qui arrache des copeaux à la pièce. Et puis le claquement secs des coups portés par le maillet sur le manche du ciseau et en écho le bruit sourd du tranchant qui s’enfonce dans le bois.
De temps à autre, la matière s’exprime et grince. Elle est d’ailleurs presque plaintive quand on la contraint à prendre place dans un assemblage. C’est alors que l’on peut percevoir le « ploc » discret des gouttes de colle en excès qui viennent choir au sol au milieu du silence.
Ensuite, le cliquetis métallique des serre-joints que l’on desserre et que l’on range se fait assourdissant. Puis, comme après la tempête, le calme revient. Presque méditatif. Et si l’on tend l’oreille, on peut alors percevoir le bruit feutré des doigts qui caressent les veines du bois.
C’est dans l’atelier que toute la grâce opère…
Vers les articles du blog « La vie de l’atelier«
Vers l’ancien atelier: T2Woodworks